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FC + Crédits : Tala Ashe (hemera)
Occupation : exploratrice & The Fool / Wraith Squadron
Côté Cœur : célibataire
Localisation : en exploration
Tala Ashe
Aptitudes
Chronologie
Now – Aethernus's Moon, Unknown Regions
Allana Caine leva la torche lumineuse au-dessus du gouffre, enclenchant dans le même temps sa charge : son éclat, d'un bleu intense, mordit dans les ténèbres alentours, révélant petit à petit un paysage à couper de souffle. La jeune femme resta debout un long moment à contempler le paysage inédit qui s'offrait à elle, en oubliant presque de respirer, comme si elle avait peur de contaminer l'endroit de son souffle. Rien de vivant n'avait dû pénétrer ces ruines depuis des siècles, voire des millénaires, et elle en venait à se demander si sa présence ici ne violait pas quelque loi immuable de la galaxie depuis bien longtemps oubliée.
Bah, puis qu'elle était là... Comme le disait toujours l'un de ses pères, quand on avançait dans l'inconnu, autant continuer jusqu'à ce qu'on finisse par l'appeler par son prénom, sinon ça ne valait pas le coup. Son autre papa aurait seriné quelque chose de plus prudent, mais elle pouvait imaginer ses yeux luire de curiosité à l'idée du savoir renfermé à l'intérieur de la lune. Pour la énième fois, elle remercia la Force, la gravité, et tous les dieux perdus de vue qui faisaient marcher l'univers : la caravane qui lui avait vendu les plans de la carte stellaire ne lui avait pas fait défaut. Qu'ils ne sachent pas encore exactement qu'il la lui avait vendue n'était pas très important. Après tout, l'objet prenait la poussière au sein de leur base de données depuis bien trop longtemps pour qu'ils s'en soucient vraiment, et puis une demi-tonnes de kamqwats était un paiement plutôt avantageux. Odorant, certes, et le jus avait tendance à couler après trop de temps passé en cale -personne n'avait jamais vraiment su comment conserver efficacement le kamqwat (d'ailleurs, personne ne savait d'où venait réellement ce fruit étrange)- mais ils devraient avant tout la remercié d'avoir ainsi su l'introduire à leur bord. Et puis sur les bons marchés, la denrée exotique s'écoulait bien, on trouvait toujours quelqu'un d'assez entreprenant pour vouloir s'emparer du lot et tenter de les planter quelque part. Ça ne marchait jamais, mais ça valait toujours le coup d'essayer (un autre moto auquel Allana souscrivait volontiers, en ajoutant que « c'était juste qu'on n'essayait pas assez fort, et puis bon, c'était quand même fun ! »).
Toujours est-il que les kamqwats l'avaient menée à la carte, qui l'avait menée à la borne, qui l'avait menée ici. Au cœur même d'une des légendes de la bordure extérieure concernant les mystérieuses régions inconnues. On racontait qu'il existait une lune, voyez-vous, qui se trouvait être creuse ! Et qu'à l'intérieur...et bien, personne ne s'accordait vraiment sur ce qui pouvait bien se trouver à l'intérieur. Une ancienne armée d'être immortels génétiquement modifiés en gestation comme dans un œuf, une usine de vaisseaux spatiaux organiques, tous les trésors de la dynastie Qwi, une espèce particulièrement saisissante et mortelle d'araignée cosmique, des mines de cristal, ou des gisements d'épices mythiques...ou peut-être même, enfin, l'origine véritable des kamqwats ! Allana ne savait pas à quoi s'attendre, et c'était aussi bien. Quelque part, elle ne savait jamais vraiment à quoi s'attendre quand elle se mettait à la recherche de quelque chose, et c'était encore mieux ! Qui avait envie de tout connaître à l'avance ? Le frisson de la découverte, voilà ce qui constituait une bonne aventure. Qu'on puisse en revendre une parti après n'était qu'un à côté agréable qui permettait de financer d'autres aventures.
« Quand on a un pied dedans, autant ramener le deuxième. » murmura-t-elle pour elle-même. Une autre maxime qui lui avait bien servi, qu'il s'agisse de découvrir de nouveaux vestiges ou de les diriger dans le fondement d'un être agaçant (pour peu qu'on sache où le trouver ce qui, selon l'espèce, n'était pas toujours aussi évident qu'on pourrait le croire). Elle se pencha au bord du précipice, et fit basculer ses lunettes d'observation sur le nez. Après des années de bidouillage, elles étaient devenues indispensables à ses péripéties, et puis il n'y avait qu'elle pour savoir vraiment décrypter le fouillis d'informations qui s'affichaient sur l'interface. Le dernier nomade a les avoir essayées en avait vu pour un sacré mal de crâne. C'était comme une explosion d'informations dans tous les sens, avait-il dit, comme plonger la tête la première dans un océan de données. Allana aimait bien l'idée : elle se sentait souvent plus à l'aise plongée dans les données que dans les gens. On ne pouvait jamais lire les gens aussi bien, il fallait toujours qu'ils formulent quelque chose qui ne voulait pas vraiment dire ce qu'ils pensaient, et les mots ne suffisaient plus vraiment. Caine aimait l'exactitude lorsqu'il s'agissait d'exprimer un ensemble de données, qu'il s'agisse des résultats d'un scan informatiques ou de ce que l'on disait vouloir manger au petit-déjeuner. Dans ses oreilles, les écouteurs intégrés diffusaient une musique qu'elle jugeait digne de son exploration ; ses pères lui avaient souvent dit que ce n'était pas très prudent de s'aventurer en terrain inconnu avec du son plein les oreilles, mais là encore elle fonctionnait mieux ainsi. Elle n'avait jamais aimé le silence, et puis...il y avait toujours eu quelque chose pour l'avertir du danger. Un instinct qu'elle ne pouvait pas vraiment comprendre, alors elle n'avait jamais vraiment cherché à le faire. Il était là, c'est tout.
Entre la torche et les lunettes, le paysage qui s'offrit à elle suffit pour arrête nette toutes les pensées parasites : comme souvent, la force de sa curiosité en devenait sa force motrice, qui dirigeait toutes les parties éparses de son esprit sans cesse affairé dans une seule direction ; du moins, jusqu'à ce que la prochaine chose brillante détourne à nouveau son attention... Mais là, il aurait fallut faire fort. L'humaine se trouvait non pas au bord d'un simple pont au-dessus d'une gorge, comme elle l'avait d'abord pensé, mais d'une sorte de passerelle qui s'étendait des profondeurs de la lune à une autre. Plus impressionnant encore, la structure semblait se répéter à l'infini en-dessus et en-dessous d'elle, sans qu'elle ne puisse trouver un schéma logique à leur disposition. Les ponts s'étendaient au-dessus du vide selon des angles et des directions comme semées au hasard, de même que les distances qui les séparaient : en hauteur, la plus proche devait s'élever à au moins dix mètres au-dessus de la tête de Allana, tandis que sous elle, à peine deux mètres la séparait de la prochaine. Elle avait l'impression de se retrouver à l'intérieur d'un gigantesque gratte-ciel en construction dont les poutrelles de la structures s'élançaient dans tous les sens sans jamais se rejoindre ni se croiser. Il devenait même difficile de conceptualiser l'ensemble alors même qu'il se déployait devant ses yeux, tant ces derniers persistaient à lui dire qu'une telle configuration était quasiment impossible, sans parler de la gravité qui régnait à l'intérieur d'Aethernus... Mais son cerveau, lui, avait toujours traité ce qui était possible ou non différemment de la plupart des gens, du même qu'une grande partie des informations qu'il recevait. Si bien qu'un seul mot s'imposa à elle pour souligner ce moment historique : « Cool ! »
L'exploratrice n'allait pas s'arrêter en si bon chemin. Elle se concentra pour mieux absorber les données visuelles qu'elle enregistrait, et plus elle en voyait, plus elle était fascinée devant ce monde incroyable qui s'offrait à elle. Le long des passerelles poussaient -ou s'articulaient, il était difficile de dire où s'arrêtait le mécanique et ou commençait l'organique- des feuilles dont les plus grandes faisaient au moins deux ou trois fois la taille de Allana. En fait, le système lui donnait l'impression d'une suite de jardins suspendus, connectés entre eux par des lianes à l'air solide qui s'entremêlaient selon des courbes plus artistiques que pratiques. En concentrant encore plus son esprit, elle avait presque l'impression que tout l'ensemble...vibrait, ou respirait, la différence était difficile à saisir. Elle pouvait le sentir dans sa chair, à travers les vêtements épais de sa combinaison et le masque à oxygène. S'agenouillant, elle posa une main gantée sur le sol, et elle eut une impression...peut-être pas de vie, mais en tout cas d'éveil. De quelque chose qui dormait là, depuis longtemps, comme un rêve interrompu...
Ce n'était certainement pas en restant plantée là qu'elle allait en apprendre plus. Prudente, elle fixa les sécurité de sa ceinture autour d'une liane qui lui semblait solide, et elle se laissa lentement glisser jusqu'à l'étage d'en-dessous. Quand elle atterrit au milieu des feuilles, elles frémirent d'abord doucement avant de lentement s'écarter sur son passage. Des traînées de lumière bleue se répandirent comme des vaines le long des feuilles, contribuant à donner à l'ensemble un air si étrange mais si beau qu'elle sentit son cœur se serrer jusque dans sa gorge, témoin privilégiée d'un tel spectacle. Jusqu'à ce que quelque chose d'autre attire son attention. Elle se baissa jusqu'à se retrouver à quatre pattes, ses mains fouillant dans des réseaux de feuilles plus petites jusqu'à révéler le métal trahi par un bref éclat. Il s'agissait indubitablement d'une tête de droïde, même s'il s'agissait là d'un modèle qu'elle n'avait jamais vu. Il était ancien, rouillé, et une sorte de mousse bleuâtre s'était attaqué aux matériaux qui le composaient. Il était vaguement humanoïdes, révélant deux fentes là où on s'attendait à voir des yeux. Du reste du corps, elle n'en voyait aucune trace. Juste ce crâne de droïde, seul et abandonné depuis longtemps dans la poussière d'un monde perdu... Très délicatement, elle posa ses mains de chaque côté d l'objet, baissant la tête jusqu'à le frôler du front.
Souriante, elle se souvint.
Jakku - cinq ans
« Roger roger » furent les premiers mots qu'il prononça à son encontre, et elle sut aussitôt qu'il deviendrait son meilleur ami. Elle n'avait pas de nom à l'époque ; si des parents lui en avaient donné un, ils étaient morts ou disparus bien avant qu'elle ne put en avoir le moindre souvenir, à peine une impression. Elle n'avait jamais su comment elle était arrivée là, ni même d'où elle pouvait bien venir. Cela n'avait jamais été important. La famille, c'était celle qu'on se faisait en grandissant plutôt que quelque chose d'aussi arbitraire que le sang. Le nom, c'était les gens qu'on aimait qui nous le donnait.
A cinq ans, ces considérations elle les comprenait intimement, mais elle n'y pensait pas très souvent. Elle avait bien d'autres choses plus importante à faire, comme survivre. Orpheline, elle était à sa place sur Jakku ; si Tattoine se considérait comme le point le plus éloigné du centre actif de l'univers, on disait que tous les rebuts finissaient sur un Jakku un jour ou l'autre (tout ce qu'il manquait à la planète oubliée pour être encore plus désastreuse, c'était d'être le théâtre d'une terrible bataille ou quelque chose dans ce goût-là. Dans l'attente d'un tel destin, ce n'était qu'un cimetière où l'on se débarrassait aussi bien des épaves encombrantes que des gens). Rebut. Un mot qu'elle aimait bien, dont elle se sentait même fière, parce qu'elle aimait bien le prononcer un air de défi sur son petit visage, et qu'elle se l'était très vite réappropriée. Si elle devait être un rebut, comme tous les droïdes trop malfichus pour que même les chercheurs d'épaves les abandonnent à leur sort, elle serait le meilleur rebut qui soit.
Quand on devait l'appeler -ce qui ne se faisait pas souvent, les gens de l'avant-poste faisant peu de cas d'une gamine venue de nulle part et qui n'irait à leurs yeux jamais beaucoup plus loin- on l'appelait Tiny. Cela aussi, elle s'en fichait. Oui, elle était petite, et oui, elle avait décidé que ça aussi, ce serait son truc. Et puis certaines et et certains étaient bien content de pouvoir compter sur elle quand il fallait se faufilait dans les interstices d'une épave où nul adulte n'aurait pu s'introduire. Contre quelques rations -elle ne mangeait pas beaucoup, elle était petite après tout, c'était un avantage, non?- et de quoi survivre.
Elle avait de toute façon très vite préféré la compagnie des droïdes dépossédés qui hantaient les abords de l'avant-poste, ceux dont les pièces ne valaient même plus l'effort de les désosser jusqu'au bout, ceux qui n'avaient plus de maître, ceux qui roulaient, marchaient ou flottaient maladroitement à l'ombre des grands vaisseaux écrasés. Une véritable petite colonie robotique de laissés pour compte qui s'était réunis à travers les aléas du hasard et ce désir de survivre qui prenait même racine chez ces individus mécaniques dont on ne s'était jamais soucié de rebooter la mémoire. En un sens, ces droïdes l'avaient élevées plus que quiconque sur Jakku. Une vieille unité protocolaire un peu guindée à la voix déformée dans les basses lui avait appris le basic, ainsi que les rudiments de quelques langages issus de ses banques de données. Parfois, les circuits se croisaient au point qu'il commençait à lui apprendre une langue inédite constituée de variations de plusieurs autres qu'il mélangeait sans le savoir. Tiny aimait bien ça, tout ce qui était inédit. Différent. Elle en tirait de la force, elle qui n'aimait pas trop les gens parce qu'elle les trouvait non pas forcément méchants mais...compliqués, trop compliqués pour elle qui préférait aller droit au but et qui ne s'embarrassait jamais de conventions sociales, principalement parce qu'elle ne savait pas ce que c'était mais aussi parce que le peu qu'elle en en percevait lui paraissait absurde. Et bien moins intéressant que d'apprendre à parler une langue inventée et inutile, mais qui n'appartenait qu'à elle.Et puis son esprit avait toujours éprouvé une connexion instinctive envers les machines, plus forte encore que le sens de danger qui lui évitait souvent les ennuis.
Elle avait vécu ses premières au milieu des droïdes, qui en vinrent à considérer cette humaine particulière comme une des leurs. Maîtresse Tiny, celle qui se souciait de leur sort mais qui ne cherchait pas à les mener à la baguette. Pour des droïdes si longtemps dépourvus de but, elle était devenue un point auquel se raccrocher, une cause autour de laquelle ils pouvaient dévouer leur existence à nouveau. Une existence durement gagnée sur un monde impitoyable, mais une existence qui leur appartenait.
C'est en fouillant dans l'une des innombrables piles de déchets qui jonchaient la planète qu'elle trouva Mister Roger. Impossible de dire comment il était arrivé là : il datait de bien avant la fameuse bataille de Jakku qui avait vu tous ces vaisseaux s'écraser dans les étendus désertiques. D'une manière ou d'une autre, tous les rebuts finissaient sur Jakku. Tous les rebuts commençaient sur Jaku. Elle trouva d'abord le bras, dont la main aux doigts fin dépassait d'un tas de circuits. Puis elle avait dégagé le torse et, enfin, la tête. Détachée, elle s'était trouvée un peu plus loin, aussi inerte que le reste. Mais Tiny l'avait prise à deux mains pour la presser contre son front, mue par cet instinct qu'elle ne comprenait pas mais qui animait un grand nombre de ses actions : dans le même temps, elle avait rejoint les fils qu'il fallait, appuyé au bon endroit, et après un bref grésillement les yeux inexpressifs du droïde de combat némoïdien avaient repris vie, et ses premiers mots avaient retentis, probablement l'écho des derniers qu'il avait dû prononcer avant d'être désassemblé.
Au fil des jours, tandis qu'elle le reconstituait bon gré mal gré avec l'aide des autres droïdes, cannibalisant une pièce par-ci, échangeant une pièce par-là, elle en avait appris plus sur son nouveau compagnon. Il avait été assemblé il y a bien, bien longtemps sur un monde appelé Géonosis ; un autre désert, à croire qu'il n'existait rien d'autre dans cette galaxie... Mais il lui parla des autres mondes sur lesquels il avait fait campagne : les jungles de Felucia, les cristaux de Christophsis, les arbres géants de Kashyyyk et les océans à perte de vue de Mon Calamari. Il avait été trimballé de conflit en conflit, avec au cœur de sa programmation des ordres aussi simples qu'immuables : tuer les clones, tuer les jedi, obéir aux ordres, toujours. Mais jamais il n'avait eu la mémoire effacée. Ses maîtres ne s'attendaient pas à ce que leurs simples droïdes de combat survivent longtemps, souvent cela ne valait pas la peine de faire cet effort. Mais contre toutes attentes, lui avait survécu. Quand tous ses frères de métal, ceux au côté desquels il s'était animé pour la première fois à la sortie de la chaîne de production, avaient été détruit les uns après les autres, il avait continué. Il avait appris à exister. Et puis il avait été lui-même détruit dans un combat dont il ne se rappelait pas. Comme Tiny, il ne savait pas pourquoi il s'était retrouvé sur Jakku. Comme Tiny, les gens qui l'avaient fait étaient depuis longtempts morts et disparus. Comme Tiny, il n'avait rien d'autre au monde que ce qu'il déciderait d'y mettre.
Alors il décida qu'il n'avait plus envie de tuer des clones, des jedi ou qui que ce soit. Il décida qu'il voulait simplement cette petite humaine qui l'avait remise en état. Il décida tout ça en quelques milisecondes où son cerveau de droïde passa trop de scénarios en revue pour qu'il puisse tous les exprimer un jour. Dans sa mémoire robotique, tout était gravé, mais un souvenir devint aussitôt le souvenir primaire, le souvenir le plus important : celui du visage d'une petite fille souriante qui se pressait contre le sien, et la chaleur dans sa voix quand elle répondit : « Bonjour Monsieur Roger, moi c'est Tiny. »
Et ce fut ce jour où, par change ou par destinée, elle trouva la tête de Monsieur Roger dans les ordures et réussit à la remettre en route, ce jour précis, avant qu'ils ne commencent à le remettre en état avec l'aide des autres droïdes, qu'ils décidèrent tous les deux qu'ils seraient inséparables.
Now – Aethernus's Moon, Unknown Regions
Allana reposa doucement le crâne du droïde, lui témoignant presque une révérence qu'il n'avait sans doute jamais connu de son vivant. Peut-être avait-il été un compagnon mécanique de confiance, pour quelqu'un d'autre, ou un simple explorateur, comme elle. Ou un simple laquai de métal, un rebut laissé là, à rouiller doucement sous le lichen lumineux aux allures de néon qui poussait ici et là le long de ce que le cerveau de la jeune femme persistait à appeler des plafonds tout en sachant que ce n'était pas le bon mot. C'était vraiment le problème avec les mots, il y avait trop d'occasions où ils n'étaient pas suffisants. A peine adéquats. Une raison de plus pour laquelle elle trouvait le fait de communiquer avec ses semblables si difficile parfois. Elle avait toujours l'impression de devoir lutter pour trier les innombrables impressions qui tourbillonnaient sous son crâne, et qui l'empêchaient d'exprimer réellement ce qu'elle voulait vraiment dire.
Elle avait toujours été plus à l'aise avec l'écrit. Quand elle pouvait prendre le temps d'ordonner tout ce grabuge, ou prendre le temps de déchiffrer les mots inscrits sur un écran, ou une feuille de flimsiplast. Il y avait un rythme dans l'écriture, qu'on pouvait déchiffrer au-delà des mots. Et puis il y avait le code, plus pur encore, dépouillé d'un bagage émotionnel qui se transformait en barrière lorsqu'il s'agissait de communiquer. Mais cela ne voulait pas dire non plus que le code était incompatible avec les émotions. Elle avait connu bien des droïdes plus émotionnels -plus réels- que de nombreux êtres de chair et de sang. Ou de tout autre matériel biologique adéquat.
Caine se demandait si Aethernus avait été peuplée, un jour, et quel type de liquide pouvait bien circuler dans leurs veines. Peut-être même qu'ils n'avaient pas de veines. Peut-être qu'il s'agissait d'un peuple entiers de droïdes comme celui-ci. Peut-être qu'ils venaient d'une autre galaxie. Peut-être qu'il n'y avait jamais eu personne aux commandes, personne de natif, et que la lune se contentait d'exister à la frontière des espaces, un mystère qui n'en était un que parce que l'esprit sentient ne pouvait concevoir qu'il n'existait aucune réponse. De ne serait-ce que de considérer que l'univers pouvait se montrer vain dans ses créations, dépourvu de la moindre ambition. Peut-être qu'il n'y avait aucune réponse sur Aethernus.
N'empêche que la vue n'était vraiment pas mal. Il y avait quelque chose à poser les yeux sur un territoire presque inédit. Elle prenait soin d'enregistrer le plus de données possibles bien sûr -ses parents ne lui pardonneraient jamais autrement (ou plutôt, Luter aurait très vite sombré dans la consolation par le chocolat et un vieil holo, tandis que Kwon aurait affiché un air sévère avant de les rejoindre après avoir boudé une heure ou deux). Des donnés à être étudiées plus tard. Parfois, il fallait s'éloigner de ce que l'on avait sous les yeux pour mieux le comprendre. Mettre un peu de distance. C'était facile de se laisser imprégner par la mystique d'un lieu quand on se retrouvait au cœur, et la mystique était bien belle, mais elle ne répondait pas vraiment aux vraies questions, du moins de l'avis de Allana.
Laissant les restes du droïde oublié -qui ne l'était plus, pas par elle ; que quelqu'un puisse maintenant se souvenir de lui justifiait l'entier du voyage aux yeux de l'exploratrice- elle décida de continuer son avancée. Ou plutôt, sa descente. C'était comme s'aventure entres les branches d'un arbre mystérieux, un bâtiment impossible, une maison de feuilles entre lesquels jusqu'au temps semblait se distendre. Elle repensa à ses parents, Luter et Kwon, plongeant plus profondément entre les arcs et les poutrelles, dans une descente pas si différente de celle qui lui avait permis de rencontrer les deux hommes qui deviendraient sa famille, prouvant une fois de plus que ce n'était pas toujours le sang qui avait son importance...
Jakku – 12 ans
Sur le coup, ça avait paru un bonne idée. C'était fou le nombre d'idées qui paraissaient incroyables au moment même où on y pensait. D'ailleurs, quand il suffisait simplement de penser, c'était plutôt facile : de ce qu'en avait décidé Tiny, toute idée était bonne à prendre. Il n'y en avait pas vraiment de mauvaises, jamais quand elles faisaient irruption sous votre crâne. C'était plus tard qu'elles risquaient de causer un problème, mais...et bien, la seule pensée qu'elle accordait généralement au concept de « plus tard », c'était justement que ça se passait, ben, plus tard. Là tout de suite, ce n'était jamais très important, ce qui allait arriver après. Pour cette gamine qui se débrouillait pour survivre depuis douze ans sur une planète comme Jakku, le futur était un concept extrêmement relatif, qu'il s'agisse de celui dans cinq minutes ou dans cinq jours.
L'instant présent, c'était ce qui comptait vraiment. C'était ce qu'on faisait après tout. Le reste, une fois qu'on l'avait fait, ça devenait le passé. Dans sa logique très personnelle, le futur n'existait donc pas, vu qu'on ne pouvait de toute façon pas le faire avant d'y être, devenant du coup le présent. Le futur, elle n'en avait jamais eu, et on le lui avait dit plus d'une fois. Bien assez pour que même dans la tête d'une fillette intelligente, cela finisse par laisser des traces indélébiles. Qu'elle n'en ait pas réellement conscience ne l'aidait en rien à se faire une idée du concept, aussi se contentait-elle de vivre au jour le jour. Ou plutôt, poussant l'idée jusqu'à son paroxysme, elle vivait à la minute. Parce qu'elle ne savait jamais ce qui pourrait attirer son attention soixante secondes plus tard. Un des rares vaisseaux qui descendaient dans l'atmosphère pour se poser plutôt que s'écraser. Un des énigmatiques animaux du coin qui jaillissait du sable. Un nouveau modèle de droïde qu'elle n'avait encore jamais vu, aussi vieux et à moitié démonté soit-il. L'éclat au soleil du métal d'une nouvelle épave encore pas découverte par ses soins. De toute façon, tant qu'elle ne l'avait pas découvert, elle partait du principe que cela ne l'avait pas vraiment été, sinon les gens auraient forcément trouvé tout ce qu'il y avait d'intéressant. Elle, elle trouvait mieux. C'était comme ça. Après, mieux était un terme relatif, et son mieux à elle n'équivalait que rarement avec celui du prosecteur moyen ou de la prospectrice moyenne. Mais elle avait le chic pour trouver des trucs intéressants, ça c'était sûr. Certains des autres êtres coincés sur Jakku voulaient bien le lui reconnaître en grommelant : la p'tite Tiny, elle avait pas plus de futur qu'eux -c'était ce qu'on se disait pour se réconforter, et parce que c'était tellement plus facile de mettre tout le monde dans le même vaisseau- mais elle avait le truc. Le truc qui faisait que s'il y avait quelque chose de rare, d'étrange ou tout simplement d'incongru, elle allait finir par mettre la main dessus. En réalité, elle tombait dessus plus souvent qu'elle n'y mettait d'abord la main, souvent d'un peu trop haut, mais c'était une manière comme une autre que de découvrir des choses. Et puis grimper ou tomber, ce n'était qu'une question de perspective. Quand elle se retrouvait sur le dos, le souffle coupé, il lui suffisait de se dire que le plafond au-dessus d'elle n'était que le plancher qu'elle venait de quitter. Ce qui, suivant l'angle des vaisseaux enfoncés dans le sable, n'était pas vraiment éloigné de la vérité. C'était pareil pour le temps, voilà : relatif. Parfaitement. Elle ne voyait pas pourquoi elle se serait soucier du relatif.
Tout ça, dans le petit bout de présent qu'elle était présentement occupée à vivre, elle n'y pensait pas vraiment. Principalement parce qu'elle était occupée à essayer de ne pas se noyer. Sur Jakku. Elle n'avait jamais su trop faire les choses comme tout le monde. Tout partait -ou découlait, ha ha- de la fameuse bonne idée du moment. Un moment qui commençait sérieusement à lui manquer, parce qu'au sec et pourvu de tout l'oxygène nécessaire. La bonne idée, donc, cela avait été de se faufiler dans une de ces épaves parmi les plus éloignées de l'avant-poste, généralement peu explorée parce que pratiquement enterrée dans son entièreté, et dans un sens qui n'était certainement pas d'usine, et qui n'avait même peut-être rien à voir avec les lois les plus élémentaires de la physique. C'était difficile de réfléchir aux lois élémentaires de la physique quand on avait de l'eau salée qui vous rentrait dans le nez. L'eau s'expliquait pour une raison très simple : le bâtiment échoué était un bâtiment de croisière calamarien (laissé là par une compagnie stellaire ruinée depuis longtemps), et les vaisseaux calamariens avaient à leur bord plusieurs bassins océaniques, permettant aux nombreux êtres aquatiques qui officiaient généralement à leur bord de renouer avec l'élément liquide dont ils étaient issus lorsqu'ils en avaient l'occasion. Seulement, ça, c'était quelque chose qu'on avait tendance à oublier, et dans lequel on ne s'attendait pas à tomber à travers une vitre fracturée et plusieurs puits de liaison. Le bassin n'était pas grand, mais assez profond pour qu'elle n'ait juste pas pied, frôlant à peine le sol du fond de ses bottes, et penché d'une manière qui ne laissait face à elle qu'un mur lisse et que le temps avait couvert de petites algues glissantes. Cela faisait plusieurs minutes qu'elle s'agitait dans tous les sens avec l'énergie du désespoir. Ce n'était pas sur Jakku que l'on apprenait à nager, et elle commençait déjà à sentir ses forces s'épuiser, déjà bien diminuées après son exploration. Maintenir quelques brefs instants la tête hors de l'eau pour aspirer quelques goulées d'un air rance et humide devenait de plus en plus difficile entre deux plongeons dans l'eau de mer croupie.
D'habitude, quand elle tombait, il y avait Mister Roger pour la rattraper. Depuis toutes ces années, le droïde avait développé une sorte de sixième sens électronique lorsqu'il s'agissait de tendre l'un de ses longs bras rapiécés de bric et de broc pour saisir le col/la chemise/la ceinture/les bottes/et une fois dans un cas nécessaire mais douloureux les cheveux de l'humaine. Les deux avaient développé une complicité -ou du moins Tiny avait décidé de le voir ainsi, le droïde restant la plupart du temps assez insondable- qui les avaient rendu inséparables. Roger était son ami, son compagnon d'aventures, son confident. Il était celui qui la rattrapait quand elle tombait, distraite par la nouvelle trouvaille aperçue un peu plus loin, un peu plus bas.
Mais pour cette dégringolade, Mister Roger ne l'avait pas rattrapée. Et ça, c'était sa faute à elle, parce que c'était Tiny qui n'avait pas su le saisir au dernier moment quand le droïde s'était précipité au-dessus du vide avec la vieille cellule d'énergie qui s'était mise à crépiter dangereusement. Elle n'avait pu que suivre sa chute des yeux, jusqu'à ce qu'il disparaisse, avalé par les profondeurs du soudain sinistre croiseur, comme s'il avait été happé par les entrailles d'un monstre marin redoutable, obscur et affamé. Elle avait entendu l'explosion, ou du moins elle croyait en avoir entendu une. Elle croyait aussi avoir entendu un dernier « Roger, roger ! » -le seul mot que son vieux vocodeurs était capable de transmettre, mais dans lequel il arrivait curieusement à influer quantités d'émotions différentes- entre la tristesse et le devoir accompli. Qu'elle l'ait entendu ou pas, cela la hantait. Pouvait-on être hanté parce qu'on n'avait peut-être même pas entendu ?
Oh que oui. Tout le temps.
Sans réfléchir plus d'une bonne minute, elle avait décidé de descendre. Plus loin, de plus en plus loin vers le cœur du léviathan. Non pas une bonne idée -c'était dangereux, trop dangereux, elle le savait, entre l'état décrépit du vaisseau, le métal qui cédait sous la moindre pression, et l'eau qui attendait... Mais son seul ami était tombé dans les ténèbres à cause d'elle, et elle ne s'imaginait pas revoir la lumière sans lui. Pas sans avoir tout essayé. Le futur, ça n'arrivait qu'aux autres de toute façon. Et puis cela n'aurait pas été juste qu'elle ait une chance d'en avoir un si cela voulait dire sacrifier celle de Mister Roger. Dans son jeune esprit sans compromis, c'était comme ça. Jamais de bonnes excuses pour refuser d'affronter les ténèbres, c'était inscrit en elle : parce que sinon, elle le savait à un point instinctif, on ouvrait la porte pour les mauvaises.
Elle avait fini par glisser, ses réflexes et son don ne l'avaient pas sauvées, et elle était tombée dans le bassin. Seule. Et petite, petite comme elle ne s'était jamais sentie petite. Insignifiante, et cette seule idée la terrifia presque plus que celle de suffoquer, de l'eau gluante et ancienne plein les poumons.
Est-ce que c'était tout ? Juste ça, la vie ? On lutte, on essaie de prendre le meilleur moment par moment, et après on meurt ? Elle se demandait ce que c'était, soudain étrangement calme tandis qu'un froid transcendant celui de l'eau s'emparait de tout son corps, de mourir. Une nouvelle aventure, peut-être... Le futur de celles et ceux qui n'en avaient pas ?
Puis elle sentit une main puissante se refermer sur son poignet. Mister Roger ? Pensa-t-elle confusément tandis qu'on la tirait vers la surface, mais non, la main n'avait pas la texture, la sensation, la force du métal. Mais n'en relâchait pas moins son emprise. Ce ne fut que lorsqu'elle se retrouva sur la terre ferme – ou plutôt un bout de passerelle tout tordu mais assez stable- et qu'elle eut finit de tousser et de cracher qu'elle put enfin lever les yeux sur son sauveur. Un homme, un grand qui le lui paraissait encore plus dans cet instant unique, présent, oh oui présent, à jamais présent dans sa mémoire, un de ces moments qui n'en finit jamais tellement il était important. Presque un géant à ses yeux, même s'il ne l'était pas. Une combinaison de cuir, de métal et de fourrure, des espèces de grosses lunettes de pilotes sur le nez qui grossissaient ses yeux inquiet de manière presque comique, mais qui décuplait aussi la gentillesse dans son regard, entre deux éclats d'une inquiétude sincère. Tiny avait toujours été plus sensible avec les choses, les machines quand son don était concerné, mais elle sut que cet homme ne lui voudrait jamais aucun mal, et qu'il ferait désormais partie de sa vie. Entendre sa grosse voix grave, un peu penaude même dans le stress, ne fut que confirmer son impression. Elle tendit sa main pour effleurer la grosse barbe noire tressée sur une peau de la même couleur, et sentit le soulagement qui s'était emparé de cet homme qui deviendrait son père.
« Luter ? Luter ? » répétait une voix dans le comlink qu'il avait d'accroché à sa ceinture. Une voix inquiète, tendue, qui vous donnait tout de suite l'impression non pas de quelqu'un de strict, en tout pas autant qu'il voulait le faire croire, mais de quelqu'un qui s'inquiétait presque beaucoup trop. Une voix qui tenait aux autres.
« Tout va bien, Kwon. J'ai décidé d'explorer un peu plus loin et j'ai trouvé... » Il sourit de son sourire de géant qui n'était pourtant pas si grand. « Comment tu t'appelles, adi'ka ? »
« Tiny. » fut tout ce qu'elle put dire, mais elle sut plus que jamais que ce n'était pas son nom. Et qu'elle n'allait pas tarder à le découvrir enfin. Pas celui qu'on lui avait peut-être attribué à sa naissance, depuis longtemps oubliés par tous, mais son vrai nom. Celui qui compte.
« Tiny. » répéta-t-il. « J'ai trouvé Tiny. Mais je crois qu'on pourra trouver mieux. Tout va bien Kwon. » répéta-t-il, les mêmes mots, des mots qu'elle l'entendrait prononcer bien souvent pour rassurer le plus anxieux membre de la famille. Kwon. Qui lui aussi deviendrait son père.
« Et si on sortait d'ici ? » demanda-t-il à la fillette de Jakku.
Celle qu'on avait pour un temps appelé Tiny lui fit son plus beau sourire. Un sourire comme le soleil.
Now – Aethernus's Moon, Unknown Regions
Un grand nombre de mauvaises idées dans l'histoire de la galaxie pouvait se résumer en une phrase très simple : il n'aurait pas fallu appuyer sur le gros bouton rouge. Ce n'était pas forcément gros, ce n'était pas forcément rouge, et ce n'était pas forcément un bouton, mais cela partageait néanmoins ces trois caractéristiques à un niveau inconscient, quasi mémétique, né d'une éternité de décisions-idiotes-qui-paraissaient-super-sur-le-moment.
Dans sa vie, Allana avait pressé un grand nombre de boutons.
Elle ne pouvait pas s'en empêcher, au point que c'en devenait presque pathologique. La curiosité agissait sur elle comme un aimait, une force contre laquelle elle avait encore moins de résistance que la gravité. D'autant que contre la gravité, on pouvait utiliser un jetpack. Pas contre les boutons (à moins, peut-être, d'inventer une sorte de mini jetpack qu'on pourrait porter sur le doigt coupable à la manière d'une bague, à allumer pour causer une poussée inverse juste avant le moment fatidique, probablement en appuyant sur un autre bouton, ce qui occuperait l'autre index. Allana rangea soigneusement cette idée dans un coin de sa tête, dans l'un des innombrables tiroirs d'un esprit qui tenait plus d'une salle des fêtes un peu après minuit que d'un bureau bien rangé).
Ce bouton-là n'était qu'une étape de plus dans une vie peuplée d'instants du même genre. Allana Caine allait généralement de découverte en catastrophe, avec juste le soupçon de chance qui lui permettait d'échapper à un destin funeste afin de recommencer la prochain fois. Elle avait beau sans cesse découvrir de nouveaux moyens de s'adonner aux joies de la technologie, question apprentissage de la vie, elle avait l'instinct moyen du tabouret. Ce dont elle ne s'était jamais plainte, parce que de son point de vue, une vie où il ne se passait jamais rien d'imprévu et de potentiellement dangereux n'était pas une vie très intéressante.
Cependant, même elle devait admettre que l'intérêt de la chute libre était relativement aguicheur quand on s'y retrouvait précipités au milieu des décombres qui pleuvaient tout autour. Pour sa défense, elle n'avait eu aucun moyen de savoir que l'espèce de panneau de commandes creusé à même la roche étrangement friable du satellite était capable d'atteindre un résultat aussi drastique. Et puis au vu de toutes les étincelles, c'était peut-être juste un bête court-circuit, là encore rien de prévisible. Ou alors, ce genre d'appareillage n'était pas conçu pour la physiologie humaine. Si ça se trouve, cela avait réagi ainsi simplement parce qu'on était un mardi. Toujours est-il que de fil en aiguilles, l'ensemble de la structure s'était mise à trembler de plus en plus fort, le lichen avait commencé à se décolle des murs dans un nuage de poussière grise, et la luminosité ambiante avait soudainement opté pour un effet stroboscopique à l'intensité si particulière qu'elle avait grillé les lunettes d'observation de l'exploratrice.
Au moins, c'était une bonne chose qu'elle ait pensé à enregistrer le plus de données possible tout au long de son avancée. Si elle survivait, elle pourrait au moins en inscrire une trace quelque part, sinon quelqu'un finirait bien par retrouver son cadavre flottant dans l'espace (c'était le genre d'optimisme auquel elle s'accrochait toujours gaiement). Si seulement elle avait eu le temps de finir sa commande d'appel pour son chasseur avant de partir (un des innombrables-projets-en-cours-promis-un-jour-je-finirai-pour-de-bon). Si seulement elle avait pensé au jetpack. Ou à une bête ceinture à répulseurs. Ou à un grappin. Voilà, le pistolet à grappin était tout bonnement indispensable, elle en avait la preuve maintenant.
Le plus triste pour elle, ce n'était même pas l'idée de sa mort aussi prochaine que probable. Ce qui l'embêtait de ce côté, c'était surtout de l'effet que cela aurait pour ses poches, à qui elle n'avait aucune envie d'infliger un tel tourment. Non, le plus triste, c'était qu'elle avait encore réussi à mettre les pieds dans le plat (ou plutôt le doigt sur le bouton), et que pour une raison qui lui échappait, Aethernus avait décidé de réagir de manière extraordinairement dramatique, causant ainsi la perte de ses secrets. C'était quand même fou, le nombre de superstructures à explorer prête à s'effondrer au moindre pas de travers. Au moins elle n'avait pas touché à l'idole mystérieuse cette fois-ci (très probablement parce qu'elle n'en avait pas trouvée. Dans son honnêteté coutumière, elle admettait sans remords que s'il y avait eu en prime une idole mystérieuse, elle la serrerait dans ses bras au moment même de la descente infernale).
Au moment où elle se disait que ça y est, tout était fini, et que sa carrière allait se terminer pour de bon au milieu de quelque part (elle ne croyait pas vraiment au concept de « nulle-part ». Du moment qu'elle s'y trouvait pour l'observer, tout endroit devenait instantanément digne d'intérêt, et donc « quelque part ». Et puis on ne pouvait pas être ailleurs que quelque part, c'était idiot), elle crut entendre un son familier. Elle s'orienta maladroitement de manière à pouvoir regarder au-dessus d'elle, apercevant une forme familière qui tombait à toute vitesse.
Elle sourit.
Le Vagabond – 25 ans
« N'oublie pas de garder les yeux fermés ! »
Avec les deux grosses mains de Luter Caine sur les yeux, Allana aurait de toute façon eu toutes les peines du monde à voir quoi que ce soit. Bien qu'étonnée par la redondance d'un telle système, elle s'était laissée prendre au jeu, totalement confiante. Après tout, cela faisait plus de deux ans que ces mains solides aidaient à la guider dans la galaxie. Ainsi que celles, plus délicates, plus nerveuses, mais tout aussi rassurantes, de Kwon. Les deux hommes qui étaient devenus ses parents, un jour lointain en orbite autour de Jakku, étaient une présence constante, un ancrage qu'elle avait accepté sans réserve. Gardiens, mentors, professeurs, amis, ils étaient tout cela, d'une manière qu'elle n'arrivait pas totalement -et comme beaucoup de choses- à exprimer mais qui importait plus que tout.
Son adolescence avait été heureuse. A bord du Vagabond -le croiseur qui menait la petite flotte de nomades spatiaux dont les Caine faisaient partie- elle avait découvert la galaxie d'une manière qu'elle n'aurait jamais cru possible quand elle était juste Tiny. Et parmi toutes les choses que les Caine avaient pu lui offrir, elle chérissait le nom qu'ils avaient choisi tous ensemble et qu'elle portait. Un nom qui ne la définissait pas autant que les actions, une leçon qu'ils avaient très vite pris soin de lui apprendre. Au sein de ce groupe d'explorateurs, qui voyageait sans cesse entre les étoiles à la recherche de vieilles technologies et de secrets anciens, elle avait appris toutes les valeurs qui allaient la définir pour le reste de sa vie. Elle avait appris à parfaire son don pour les machines -particulièrement les droïdes, toujours eux- et à piloter. Jakku lui avait déjà appris à survivre, mais ses pères et leurs amis lui avaient appris comment vivre, comment poursuivre quelque chose qu'elle n'atteindrait sans doute jamais mais qui rendait plus que jamais la vie digne d'être vécue. Ils lui avaient aussi appris à se défendre, mais aussi à considérer son esprit comme sa meilleure arme. Plutôt que de juguler sa curiosité, ils l'avaient encouragée à tous les instants.
Luter était la présence imposante, dont la carrure cachait un homme excentrique, qui préférait de loin batailler au fil de ses lectures qu'au combat. Il y avait longtemps qu'il avait troqué son armure mandalorienne pour une armure plus simple, et sa chevelure abondante n'était plus faite pour un casque. De toutes les histoires qu'il aimait pourtant plus que tout, c'en était une qu'il n'avait jamais racontée. La seule qu'il avait toujours gardée pour lui, et qu'on avait de la peine à imaginer dissimulée derrière ses sourires lumineux et ses éternelles facéties. Sa soif de savoir était sans limites, de même que son érudition dans les sujets les plus improbables. Une de ses plus grandes fiertés -et l'un des bastions de l'adolescence de sa fille- était sans nul doute la petite bibliothèque qu'il entretenait dans une cabine du Vagabond, où il avait rassemblé des ouvrages antiques, imprimés sur du papier. Leurs sujets, divers et souvent anodins, importaient peu : Luter faisait partie de ces gens pour qui la moindre bribe de savoir était un précieux trésor, et dont la découverte participait grandement à la joie.
Son tempérament fantasque était tempéré à merveille par le caractère de son conjoint. Kwon Caine était un homme prudent -inquiet, disaient certains, quand il n'était pas là pour froncer des sourcils (un mouvement qu'il avait élevé au rang d'art)- et réservé, qui n'aimait pas parler pour ne rien dire, mais dont les gestes n'étaient pas moins tendres et lourds de sens que ceux de son mari. Ancien officier, il en avait la réserve digne et une tendance à la précision qui avaient aussi beaucoup appris à sa fille. Il avait su lui accorder la latitude qu'il fallait à ses excentricités comme celle de son époux, et s'il affichait souvent l'air de celui qui s'astreignait à être raisonnable au sein de leur unité familiale, c'était un rôle qu'il acceptait autant qu'il l'affectionnait.
De leur rencontre explosives au large des lunes de Iego, elle en avait tant entendu les récits qu'elle pouvait récite l'histoire par cœur. Avec le reste de la flotte nomade, ils constituaient son univers le plus précieux, celui dans lequel elle se sentait le plus en sécurité et où elle revenait toujours entre deux aventures. Là, dans les coursives pleines de fatras du Vagabond, elle se sentait bien plus chez elle qu'elle ne l'avait jamais été sur Jakku. C'était sa maison, son foyer, et lui avait ôté toute envie d'en savoir plus ses origines, qui n'avaient dans le fond aucune importance. Ce qui comptait, c'était ce qu'on devenait.
« Doucement ! » fit la voix de Kwon, légèrement derrière les deux autres, dans la position de celui qui surveillait leur avancée. S'il y en avait bien deux qui étaient capables de détruire le vaisseau par mégarde, c'était ces deux-là.
« Ne t'inquiète pas, on gère, on... osik ! » Luter s'était emmêlée dans ses propres pieds, tout occupé qu'il était à diriger sa fille. Qu'il ait lui-même commencé à fermer les yeux n'avait sans doute pas arrangé les choses.
« Langage ! » lâcha son mari d'un ton faussement exaspéré.
« J'ai entendu pire, tu sais. » s'amusa Allana Qu'elle ait douze ans, dix-sept ou vingt-cinq, Kwon ne pouvait s'empêcher de tomber dans le rôle du père éternellement inquiet de tout.
« On y est ! Tu peux ouvrir les yeux ad'ika ! »
« Papa ? »
« Oui ? »
« Tu as toujours tes mains sur mes yeux. »
« Oh. »
Les doigts solides s'écartèrent, rendant enfin son champ de vision à une Allana aussi curieuse que jamais. Une Allana qui s'en retrouva sans voix quand elle pu enfin contempler ce qui l'attendait dans le hangar.
« On s'est dit qu'il était temps que tu en aies un à toi. »
« Cela fait un petit moment qu'on le retapait, histoire de s'assurer qu'il serait aussi performant... »
« Et sûr. »
« J'y venais : et sûr que possible. Et puis comme ça, tu n'auras plus besoin d'emprunter un des chasseurs de la flotte. »
« D'autant que tu as crashé les deux derniers. »
« Enfin, on espère surtout qu'il te plaît quoi ! »
Devant elle reposait une aile B biplace, un relativement vieux modèle récupéré elle ne savait où, mais qui lui paraissait sur le moment plus étincelant et magnifique que la plus incroyable des nébuleuses. Depuis qu'elle avait appris à piloter, Allana avait souvent caressé l'idée d'avoir son propre vaisseau un jour, mais elle s'était jusque là contentée d'utiliser un des vieux Z-95 de la flotte, ou de prendre les commandes d'un vieux transport quelconque. Peu portée sur les possessions matérielles au-delà de ses outils et des gadgets qu'elle bricolait elle-même, elle avait remis l'idée à plus tard... Et voilà que cette nouvelle liberté s'offrait à elle, entre ses deux parents qui se tortillaient nerveusement en attendant de savoir ce qu'elle en pensait.
« Il est magnifique. » réussit-elle à dire lorsqu'elle retrouva l'usage de la parole. Quand elle s'arracha enfin de l'étreinte familiale dans laquelle elle s'était aussitôt précipitée, elle s'approcha lentement du vaisseau, en caressant presque timidement la coque.
« Une idée pour ton premier voyage à bord ? »
Un sourire naquit sur ses lèvres, un sourire que les Caine connaissait bien, et qui voulait dire qu'elle ne reculerait devant rien maintenant qu'elle avait une idée dans la tête.
« Oh que oui. Je sais très bien où aller. »
Elle allait enfin accomplir ce qu'elle aurait dû faire il y a bien longtemps : le moment était venu de retrouver un vieil ami.
Now – Aethernus's Moon, Unknown Regions
Tout autour de Allana Caine, les parois continuaient de vibrer à un rythme de plus en plus soutenu. La mousse -si c'était bien de la mousse- se désagrégeait maintenant à une vitesse folle, poussant la jeune femme à protéger la bouche et le nez d'une main pour respirer sans trop d'encombres. Technologie maintenant inutile, ses lunettes avaient au moins l'avantage de simplement lui préserver les yeux. Elle fila droit à côté d'une passerelle qui s'écroula autant qu'elle s'effrita, et de sa base naquirent des fissures veinées d'un bleu fluorescent qui se divisaient en veines le long des parois. Des arcs d'énergie se mirent à crépiter, les éclairs passant d'une excroissance à l'autre sans rythme ni raison, du moins aucun que l'exploratrice n'avait le temps d'analyser dans les présentes circonstances.
Elle enregistrait tout ceci à distance, entièrement concentrée sur un élément précis : la silhouette au-dessus d'elle, qui gagnait de plus en plus de vitesse. Elle se révéla au fur et à mesure de son approche, jusqu'à représenter une figure globalement humanoïdes, aux membres fins et à la tête allongée dans un drôle de museau. Les bras plaqués le longs de son corps métallique, la machine -car il s'agissait bien d'une machine- s'était disposée comme en plein plongeon, se faisant aussi aérodynamique que possible pour gagner de la vitesse. Son poids aidant, elle finit par dépasser Allana sans même l'effleurer. Dans un choc sourd, elle atterrit une dizaine de mètres plus bas sur un pont qui tenait encore, les servomoteurs de ses jambes encaissant le choc.
Imitant la posture, Caine manœuvra de son mieux jusqu'à se retrouver à nouveau la tête en bas. Elle tendit sa main libre dans une direction précise, essayant de prévoir au mieux ses mouvements dans une série de calculs aussi abstraits qu'inconscient, laissant son instinct prendre le dessus. L'autre être déploya son propre bras à une vitesse élevée, résultat d'un esprit mécanique, et les doigts fins et solides se serrèrent autour du poignet de Allana, l'enfermant dans un étau aussi efficace que bienvenu. Ployant les genoux, le droïde tira vers le haut pour amener l'humaine à son niveau, une humaine qui avait laissé échapper un gros « Oumph ! » tandis que ses poumons s'étaient vidés sous le choc. Dès qu'elle fut considérée en sécurité par son sauveur, ce dernier déplia ses doigts et Allana se laissa tomber sur le dos, reprenant son souffle tout en adressant un large sourire à la tête oblongue penchée au-dessus d'elle :
« Merci mon pote ! »
« Roger roger ! »
Depuis qu'elle avait récupéré le vieux droïde de combat dans les profondeurs du croiseur calamarien, il y avait six ans de cela, elle n'avait toujours pas réglé le problème de son programme de langage. Si elle avait réussi à le retaper aussi bien que possible dans tous les autres aspects, y compris sa base mémorielle qui avait heureusement survécu, l'élocution de Mister Roger lui apparaissait tout aussi irrésoluble que la première fois qu'elle avait travaillé sur lui. Comme si son instinct lui avait soufflé que ce n'était pas un problème qui demandait forcément à être résolu, elle n'avait cherché à réellement percer le mystère. Après tout, le droïde avait sa propre façon de communique bien à lui, qui était-elle pour la lui enlever ? D'autant qu'il n'en était nullement agacé. Et puis, en deux mots qui étaient de plus le même, il restait pour Allana souvent bien plus compréhensible et expressif que la plupart des êtres de chair et de sang qu'elle croisait sur sa route.
« Roger roger. » fit-il, d'une intonation qu'elle devina inquiète ainsi que légèrement accusatrice.
« Je sais, je sais ! Je n'aurais pas dû te demander de rester avec le vaisseau cette fois-ci. »
Le sol fragile où ils reposaient commença à trembler, et le pied de Allana passa carrément à travers le sol lorsqu'elle voulut se relever. Une sensation plutôt déconcertante, il fallait bien l'avouer, mais pas totalement inintéressante. Mais qui n'aurait aucune importance ultérieure si les deux compagnons ne se dépêchaient pas de remonter fissa. Caine s'accrocha contre le torse du droïde, l'enserrant dans une prise solide.
« C'est quand tu veux mon grand! »
Parce que oui, Mister Roger avait eu droit à son jetpack, lui.
Il s'éleva dans les airs, poussant une longue expression électronique que l'humaine avait fini par associer à un cri de pure joie. Ils filèrent dans les airs, droit vers le haut -ou ce qui tenait lieu de haut de leur perspective- dans une série de virages et autres mouvement chaotiques. Il ne fallait pas beaucoup de temps au moteur du jetpack pour se mettre à crachoter. Bon, d'accord, elle n'aurait peut-être pas dû l'assembler à partir de ces pièces détachées là, mais l'engin était surtout censé servir en cas d'urgence, en attente d'un...prototype plus avancée. Seulement, comme avec la plupart des prototypes, Allana s'était laissée distraire par le suivant. Bah, c'était comme ça. Elle cria elle aussi -un savant mélange de bonheur et de terreur- quand ils montèrent en vrille, catapultés dans tous les sens après avoir croisé le chemin d'un de ces curieux arcs électriques.
Il s'écrasèrent plus qu'ils n'atterrirent, un détail qui n'était pas très important du moment qu'on se relevait en vie, et Caine prit le temps de lever les deux bras en l'air, en poussant une exclamation de triomphe, aussitôt imitée par un Mister Roger enthousiaste. Puis elle se précipita vers l'aile B qui les attendait, s'emparant d'un extincteur pour étouffer les étincelles qui crachotaient dans le dos du droïde, avant de l'attirer à sa suite dans le cockpit.
« C'est parti ! »
Sanglée dans son fauteuil, elle engagea les manœuvres pour un décollage rapide, et laissa ses réflexes et la chance faire le reste : le chasseur jaillit à travers Aethernus plus qu'il ne s'en extirpa avec grâce. Allana poussa le vaisseau dans une longue courbe, le temps de bien observer le phénomène qui se déroulait dans l'espace, à une distance -vaguement- sécuritaire. La lune d'Aethernus -ou quoi que ce soit que ce fut- donna l'impression de...résonner (elle ne trouva pas d'autres mots) tandis qu'il semblait s'effondrer bizarrement sur elle-même...avant de disparaître comme un objet propulsé d'un seul coup à une vitesse trop grande pour être perçu sans même donner l'impression de bouger.
Puis il n'y eut plus rien. Aethernus avait une fois de plus disparu. Pas détruite, du moins Allana l'espérait, mais simplement propulsée...ailleurs. Retrouvant sa place de mystère errant dans les Régions Inconnues.
« Roger roger... » fit doucement le droïde à ses côtés.
Elle n'eut rien à ajouter.
Still now, just a little later, so a more accurate now (for now), Nar Shadaa
Le hangar en valait un autre lorsqu'il s'agissait d'effectuer quelques réparations de fortune, et Allana avait ses habitudes, quelques endroits ici et là où elle savait pouvoir souffler un moments, trouvés au fil de ses aventures et des contacts de la flotte nomade. Elle avait déjà envoyé un message à ses parents, ainsi que toutes les données qu'elle avait pu enregistrer avant ce qu'elle appelait déjà « l'incident » d'un air distrait-mais-un-peu-mystérieux-quand-même dans sa tête.
Il faut dire qu'elle était déjà en train de réfléchir à la suite. La galaxie était pleine d'opportunités de découvertes, surtout quand on se rapprochait des Régions Inconnues et qu'on s'éloignait de l'espace connu. Qui que ce soit qui pouvait bien prétendre vouloir contrôler la galaxie -et elle trouvait le concept assez risible- elle ne s'y était jamais vraiment intéressée. Bien sûr, elle n'avait jamais ne serait-ce qu'imaginer soutenir le vieil Empire, dont les valeurs lui hérissaient- le poil, mais l'actuel ne lui semblait pas aussi pire. Et si elle avait toujours eu de la sympathie pour l'Alliance -la flotte nomade ayant ici et là facilité quelques déplacements au sein du mouvement- la Nouvelle République ne représentait pour elle que la nouvelle bureaucratie en place. Les nomades étaient également assez resté en marge des choses pour ne jamais trop attirer l'attention des sith et de leurs inquisiteurs : l'avantage des Régions Inconnues, c'est qu'on y croisait finalement assez peu d'inconnus (ni des connus, d'ailleurs). Elle avait bien conscience de ce sentiment anti utilisateurs de la Force qui commençait à prendre son importance, mais là encore elle ne s'était jamais sentie directement concernée ; c'était une part d'elle-même qu'elle n'avait jamais eu envie d'explorer plus en détails. Quant à la curieuse maladie qui sévissait à travers l'espace, et les rumeurs concernant de nébuleuses organisations de l'ombre...ma fois, voilà qui était déjà plus intéressant, et représentaient des mystères qu'elle aurait bien voulu résoudre. Du moins jusqu'à ce qu'elle trouve autre chose à faire...
Elle revenait au vaisseau, une caisse de pièces détachées dans les bras, accompagnée d'un Mister Roger qui portait le reste de la démarche joyeusement chaloupée qu'il affectionnait par défaut. Tous deux s’arrêtèrent en même temps, apercevant la silhouette qui les attendait le dos tourné au pied de l'aile B. Il se retourna comme s'il avait senti leur arrivée, découvrant un homme vêtu d'un costume sobre mais élégant, dont l'une des mains reposait sur une longue cane d'ébène. I fit quelques pas en leur direction, boitant légèrement sur une jambe, et laissa échapper un mince sourire, ses yeux ne quittant pas un instant ceux de l'exploratrice.
« Allana Caine. » fit-il. Oui, c'était bien elle, jusque là elle avait tout bon. Elle sentit son sens de la curiosité grésiller en elle, comme à chaque fois qu'elle était sur le point de se lancer dans une aventure qui ne serait pas dépourvue d'intérêt. Et très probablement de son lot de dangers mortels, mais on n'avait rien sans rien. « Mon nom est Jakobi Argento, et j'aimerais vous parler de quelque chose qui s'appelle le Wraith Squadron. »